
Même si ce terme n'apparaît pour la première fois dans un texte juridique que dans la loi Jourdan-Delbel du 5 septembre 1798, le principe de la conscription a existé dans le système de défense de la France depuis une époque très ancienne.
En effet, les obligations de service militaire, antérieures à la Révolution française, ont atteint les jeunes gens sous des formes multiples pendant des siècles, de manière successive et parfois complémentaire: le service du ban et de l'arrière ban pendant le moyen âge, les milices bourgeoises à partir du XIIème siècle, les milices garde-côtes dans les paroisses maritimes, les milices provinciales près des frontières terrestres. Ces obligations n'avaient pas de caractère universel, elles étaient le plus souvent temporaires et locales, et ne concernaient pas toutes les catégories sociales. Mais elles pouvaient intervenir en temps de paix comme en temps de guerre et entraînaient des périodes d'instruction.
L'instauration par Louvois de la milice royale à la fin du XVIIème siècle a préfiguré le système qui sera en vigueur de la Restauration jusqu'en 1815. Son organisation, fondée sur le tirage au sort d'un certain nombre d'appelés, a nécessité un recensement régulier des jeunes gens, la mise en place d'une véritable instruction militaire et s'est accompagnée des premières inégalités, liées notamment aux multiples exemptions à caractère élitiste ou professionnel ou, plus tard, à l'injuste système des remplaçants. Le caractère profondément inégalitaire du système, son peu d'efficacité sur le plan de la valeur militaire et de la durée du service, qui a pu atteindre jusqu'à sept ans en période de guerre, expliquent que de nombreux cachiers de doléances pour les Etats Généraux de 1789 aient exigé la supression des milices.

L'idée de conscription est déjà suggérée par les philisophes du XVIIIème siècle, comme Montesquieu, Diderot, Rousseau. La conscription moderne a été imaginée à partir de la Révolution française comme le mode de recrutement le plus adapté à la sécurité et à la défense du pays. L'un des apports de la Convention consiste en la promotion d'un système mixte alliant l'engagement volontaire des jeunes gens, en nombre qui se révélera malheureusement insuffisant par rapport aux besoins des armées, et la conscription, c'est à dire l'inscription sur une liste commune de toute une classe d'âge.

Les principales dates retracent les grandes étapes législatives de la conscription depuis la loi Jourdan-Delbel qui rendit le service militaire obligatoire pour tous les jeunes hommes, entre dix-huit et vingt-cinq ans, et dégagea ainsi les deux grands principes, de l'obligation militaire d'une part, de l'égalité d'autre part. Selon des modèles antinomiques, la plupart des grands textes du XIXème siècle ont instauré le recensement, le conseil de révision, l'armée de réserve formée de conscrits démobilisés, et le remplacement. Mais il faudra attendre la loi du 21 mars 1905 pour créer un véritable service universel, obligatoire et égal pour tous. Le tirage au sort est définitivement supprimé, le nombre d'exemptions réduits, les cas de dispense restreints, les sursis d'incorporation sont créés pour les candidats à des diplômes, la durée du service est abaissée à deux ans, des périodes d'exercice sont organisées pour les réservistes.
Depuis 1905, les grandes réformes ont cherché tout à la fois à aménager l'obligation militaire selon les besoins et à prendre en compte l'évolution socio-économique de la Nation française. C'est ainsi que la durée du service s'est adaptée à la démographie et aux nécéssités conjoncturelles comme l'imminence de la première guerre mondiale, qui a fait porter la durée du service actif à trois ans, ou la fin de la guerre d'Algérie qui a permis de la réduire à seize mois.

Les réformes les plus récentes ont défini la notion de service national (loi du 9 juillet 1965) en différenciant quatre formes sous lesquelles il pouvait être accompli, ont organisé le volontariat pour un service long, ont déterminé une forme particulière pour les objecteurs de conscience, créé de nouvelles formes de service, dans la police nationale ou la sécurité civile (loi du 4 janvier 1992).
Même si le service national que la plupart de nos concitoyens ont connu ne remonte pas, comme on le croit trop souvent, à la Révolution, mais seulement au début de ce siècle, la suppression du service militaire constitue donc bien une rupture majeure dans l'évolution de notre système de défense, de notre conception des devoirs de la jeunesse et de notre société.
Répondant tout à la fois à l'attachement des Français pour la conscription et au souhait d'une inévitable évolution du service national, la loi du 28 octobre 1997 a étendu le caractère universel de ce service aux jeunes filles, maintenu le recensement, créé un appel à la préparation à la défense et suspendu l'appel sous les drapeaux.
La conscription dans le monde:
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Légende:
- Vert: pas de forces armées
- Bleu: pas d'obligation (volontaire / armée de métier)
- Orange: encore obligatoire mais une suppression dans un avenir proche ( (< 3 ans) est déjà décidée)
- Rouge: obligatoire
- Gris: pas d'informations
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